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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 264 |
EAN13 | 9782824710013 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
LE BAL DE SCEA UX
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LE BAL DE SCEA UX
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1001-3
BI BEBO OK
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compris à Bib eb o ok.LE BAL DE SCEA UX
A H EN RI DE BALZA C
Son frèr e
HONORÉ.
Fontaine , chef de l’une des plus anciennes familles
du Poitou, avait ser vi la cause des Bourb ons av e c intellig enceL et courag e p endant la guer r e que les V endé ens fir ent à la
république . Après av oir é chapp é à tous les dang er s qui menacèr ent les
chefs r o yalistes durant cee orag euse ép o que de l’histoir e contemp
oraine , il disait g aiement : ― Je suis un de ceux qui se sont fait tuer sur
les mar ches du trône ! Cee plaisanterie n’était p as sans quelque vérité
p our un homme laissé p ar mi les morts à la sanglante jour né e des atr
eChemins. oique r uiné p ar des confiscations, ce fidèle V endé en r efusa
constamment les places lucrativ es que lui fit offrir l’ emp er eur Nap olé on.
Invariable dans sa r eligion aristo cratique , il en avait av euglément suivi
les maximes quand il jug e a conv enable de se choisir une comp agne .
Malgré les sé ductions d’un riche p ar v enu ré v olutionnair e qui meait cee
alliance à haut prix, il ép ousa une demoiselle de K er g ar ouët sans fortune ,
mais dont la famille est une des plus vieilles de la Br etagne .
1Le bal de Sce aux Chapitr e
La Restauration sur prit monsieur de Fontaine char g é d’une
nombr euse famille . oiqu’il n’ entrât p as dans les idé es du g énér eux g
entilhomme de solliciter des grâces, il cé da né anmoins aux désir s de sa femme ,
quia son domaine , dont le r e v enu mo dique suffisait à p eine aux b esoins
de ses enfants, et vint à Paris. Contristé de l’avidité av e c laquelle ses
anciens camarades faisaient curé e des places et des dignités
constitutionnelles, il allait r etour ner à sa ter r e , lor squ’il r e çut une ler e ministérielle ,
p ar laquelle une Ex cellence assez connue lui annonçait sa nomination au
grade de maré chal-de-camp , en v ertu de l’ ordonnance qui p er meait aux
officier s des ar mé es catholiques de compter les vingt pr emièr es anné es
iné dites du règne de Louis X V I I I comme anné es de ser vice . elques
jour s après, le V endé en r e çut encor e , sans aucune sollicitation et d’
office , la cr oix de l’ ordr e de la Légion-d’Honneur et celle de Saint-Louis.
Ébranlé dans sa résolution p ar ces grâces successiv es qu’il cr ut de v oir
au souv enir du monar que , il ne se contenta plus de mener sa famille ,
comme il l’avait pieusement fait chaque dimanche , crier viv e le Roi dans
la salle des Maré chaux aux T uileries quand les princes se r endaient à la
chap elle , il sollicita la fav eur d’une entr e v ue p articulièr e . Cee audience ,
très-pr omptement accordé e , n’ eut rien de p articulier . Le salon r o yal était
plein de vieux ser viteur s dont les têtes p oudré es, v ues d’une certaine
hauteur , r essemblaient à un tapis de neig e . Là , le g entilhomme r etr ouva
d’anciens comp agnons qui le r e çur ent d’un air un p eu fr oid ; mais les princes
lui p ar ur ent adorables , e xpr ession d’ enthousiasme qui lui é chapp a, quand
le plus gracieux de ses maîtr es, de qui le comte ne se cr o yait connu que
de nom, vint lui ser r er la main et le pr o clama le plus pur des V endé ens.
Malgré cee o vation, aucune de ces augustes p er sonnes n’ eut l’idé e de lui
demander le compte de ses p ertes, ni celui de l’ar g ent si g énér eusement
v er sé dans les caisses de l’ar mé e catholique . Il s’ap er çut, un p eu tard, qu’il
avait fait la guer r e à ses dép ens. V er s la fin de la soiré e , il cr ut p ouv oir
hasarder une spirituelle allusion à l’état de ses affair es, semblable à celui de
bien des g entilshommes. Sa Majesté se prit à rir e d’assez b on cœur , toute
p ar ole mar qué e au coin de l’ esprit avait le don de lui plair e ; mais elle
répliqua né anmoins p ar une de ces r o yales plaisanteries dont la douceur
est plus à craindr e que la colèr e d’une réprimande . Un des plus intimes
confidents du r oi ne tarda p as à s’appr o cher du V endé en calculateur ,
au2Le bal de Sce aux Chapitr e
quel il fit entendr e , p ar une phrase fine et p olie , que le moment n’était
p as encor e v enu de compter av e c les maîtr es : il se tr ouvait sur le tapis
des mémoir es b e aucoup plus ar riérés que le sien, et qui de vaient sans
doute ser vir à l’histoir e de la Ré v olution. Le comte sortit pr udemment du
gr oup e vénérable qui dé crivait un r esp e ctueux demi-cer cle de vant
l’auguste famille . Puis, après av oir , non sans p eine , dég ag é son ép é e p ar mi les
jamb es grêles où elle s’était eng ag é e , il r eg agna p é destr ement à trav er s
la cour des T uileries le fiacr e qu’il avait laissé sur le quai. A v e c cet esprit
rétif qui distingue la noblesse de vieille r o che chez laquelle le souv enir de
la Ligue et des Bar ricades n’ est p as encor e éteint, il se plaignit dans son
fiacr e , à haute v oix et de manièr e à se compr omer e , sur le chang ement
sur v enu à la cour . ― A utr efois, se disait-il, chacun p arlait libr ement au r oi
de ses p etites affair es, les seigneur s p ouvaient à leur aise lui demander des
grâces et de l’ar g ent, et aujourd’hui l’ on n’ obtiendra p as, sans scandale ,
le r emb our sement des sommes avancé es p our son ser vice ? Morbleu ! la
cr oix de Saint-Louis et le grade de maré chal-de-camp ne valent p as tr ois
cent mille liv r es que j’ai, b el et bien, dép ensé es p our la cause r o yale . Je
v eux r ep arler au r oi, en face , et dans son cabinet.
Cee scène r efr oidit d’autant plus le zèle de monsieur de Fontaine ,
que ses demandes d’audience r estèr ent constamment sans rép onse . Il vit
d’ailleur s les intr us de l’ empir e ar rivant à quelques-unes des char g es
réser vé es sous l’ancienne monar chie aux meilleur es maisons.
― T out est p erdu, dit-il un matin. D é cidément, le r oi n’a jamais été
qu’un ré v olutionnair e . Sans Monsieur , qui ne dér og e p as et console ses
fidèles ser viteur s, je ne sais en quelles mains irait un jour la cour onne de
France , si ce régime continuait. Leur maudit sy stème constitutionnel est
le plus mauvais de tous les g ouv er nements, et ne p our ra jamais conv enir
à la France . Louis X V I I I et M. Beugnot nous ont tout gâté à Saint-Ouen.
Le comte désesp éré se prép arait à r etour ner à sa ter r e , en
abandonnant av e c noblesse ses prétentions à toute indemnité . En ce moment, les
é vénements du Vingt Mar s annoncèr ent une nouv elle tempête qui
menaçait d’ engloutir le r oi légitime et ses défenseur s. Semblable à ces g ens
g énér eux qui ne r env oient p as un ser viteur p ar un temps de pluie ,
monsieur de Fontaine empr unta sur sa ter r e p our suiv r e la monar chie en
dér oute , sans sav oir si cee complicité d’émigration lui serait plus pr opice
3Le bal de Sce aux Chapitr e
que ne l’avait été son dé v ouement p assé ; mais après av oir obser vé que
les comp agnons de l’ e xil étaient plus en fav eur que les brav es qui, jadis,
avaient pr otesté , les ar mes à la main, contr e