Revue internationale de droit comparé - Année 2007 - Volume 59 - Numéro 3 - Pages 685-713 The American Federal Environmental rules do not lay down restrictions of the Greenhouse gas’s emissions. The federal legislative silence in this matter is mainly due to the existence of uncertainties and to the high costs of an organized federal action. The inaction is also due to the fact that the administration does not interpret the scientific uncertainties in a proper precaution context. This decision asks the question of whether a legislative silence must be underlined by the Courts and if so how. This decision must be considered as a part of a general movement of jurisprudence aiming to find solutions to an Environmental problem in the absence of federal rules on the global warming. It proposes a new approach of the Precaution Principle. The judges, from now, could have the power to interpret in a more open mind way the scientific uncertainties and thus make the Federal authorities take a strong action against the global warming. La législation fédérale américaine n’envisage pas les limitations d’émissions de GES dans l’atmosphère. Les incertitudes liées au réchauffement climatique et les coûts d’une action organisée et obligatoire ont beaucoup contribué à l’existence d’un silence législatif fédéral1. Cette défaillance viendrait de la difficulté d’une prise de décision aboutissant à un projet législatif cohérent et efficace. Elle viendrait aussi du refus de l’administration de tenir compte des incertitudes et d’agir dans un contexte de précaution. La question qui est soulevée dans cette affaire est celle de savoir si la carence législative de l’État concernant la limitation d’émissions de GES peut être constatée par les tribunaux et sur quelles bases2. Cette affaire s’inscrit dans un mouvement général américain qui cherche des solutions à un problème environnemental en l’absence de législation fédérale en la matière. Elle propose une nouvelle approche du principe de précaution en accordant aux juges le pouvoir d’interprétation des incertitudes scientifiques dans le sens d’une action positive de l’État. 29 pages Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.
LE RÔLE DES INCERTITUDES DANS LA PRISE DE DÉCISION AUX ÉTATS-UNIS Le réchauffement climatique au prétoire Marta TORRE-SCHAUB∗ La législation fédérale américaine nenvisage pas les limitations démissions de GES dans latmosphère. Les incertitudes liées au réchauffement climatique et les coûts dune action organisée et obligatoire ont beaucoup contribué à lexistence dun silence législatif fédéral1. Cette défaillance viendrait de la difficulté dune prise de décision aboutissant à un projet législatif cohérent et efficace. Elle viendrait aussi du refus de ladministration de tenir compte des incertitudes et dagir dans un contexte de précaution. La question qui est soulevée dans cette affaire est celle de savoir si la carence législative de lÉtat concernant la limitation démissions de GES peut être constatée par les tribunaux et sur quelles bases2. Cette affaire sinscrit dans un mouvement général américain qui cherche des solutions à un problème environnemental en labsence de législation fédérale en la matière. Elle propose une nouvelle approche du principe de précaution en accordant aux juges le pouvoir dinterprétation des incertitudes scientifiques dans le sens dune action positive de lÉtat.The American Federal Environmental rules do not lay down restrictions of the Greenhouse gass emissions. The federal legislative silence in this matter is mainly due to the existence of uncertainties and to the high costs of an organized federal action. The inaction is also due to the fact that the administration does not interpret the scientific uncertainties in a proper precaution context. This decision asks the question of whether a legislative silence must be underlined by the Courts and if so how. This decision must be ∗Normale Supérieure de Cachan, CNRS, enseignante àChargée de recherches 1, IDHE, Ecole lUniversité de Paris I Panthéon-Sorbonne, chercheuse associée au CERDEAU Paris I, enseignante à lUniversité de Chicago. 1 Hearing before the subcommission on global :Climate Change Science and Research climate change,109th Cong, 20 juill. 2005, R. J. CICERONE,National Academy of Sciences. 2M. DEGUERGUE, « Principe de précaution en droit administratif »,Revue Internationale de droit comparé, n°2-2006, pp. 621-641.
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considered as a part of a general movement of jurisprudence aiming to find solutions to an Environmental problem in the absence of federal rules on the global warming. It proposes a new approach of the Precaution Principle. The judges, from now, could have the power to interpret in a more open mind way the scientific uncertainties and thus make the Federal authorities take a strong action against the global warming. Un jour dhiver, le docteur John Magnuson regardait par sa fenêtre donnant sur le lac Mendota dans lÉtat de Wisconsin. Il pensait que la surface du lac serait entièrement recouverte dune belle couche de glace de sorte quil fut possible de le traverser à pied sans danger. Il fut déçu, une fois encore, comme depuis plusieurs années. Cela faisait presque dix ans que lon ne voyait sur le lac, hiver comme été, que les mêmes eaux claires et transparentes. « Ceci nest pas du tout ce quétaient les hivers dans le Wisconsin », se dit M. Magnuson ! Et il avait raison, car le docteur Magnuson était professeur à lUniversité et avait passé une partie de sa vie à compiler des données concernant les périodes de glace dans lÉtat du Wisconsin au cours des cent cinquante années précédentes. Il avait en effet constaté dans ses travaux que pendant les années 1950, le lac Mendota se couvrait de glace pendant au moins quatre mois suivis, alors que désormais il ne sy formait quune fine couche de glace pendant seulement deux mois3. Cette observation et bien dautres qui ont suivi se trouvent à lorigine de ce qui est considéré comme lune des plaintes « dextrême importance » présentée devant la Cour Suprême des États-Unis4. Mais, comment constituer un dossier devant les Cours se basant sur le fait quil ne neige plus assez en hiver dans le Wisconsin, dans le Vermont ou encore dans le Connecticut ? Cest ce que lon essayera de comprendre dans cette étude. De nombreux scientifiques ont conclu que laugmentation des émissions de gaz à effet de serre dans latmosphère, provenant des combustibles fossiles comme le CO2, a contribué en grande partie au réchauffement de la planète. Les États-Unis sont, pour leur part, responsables dune grande partie de ces émissions. Laugmentation de la température terrestre, provoquée par une croissance du volume des émissions de GES5, affecte autant lenvironnement que la population. Un grand nombre de scientifiques saccorde aussi à estimer quun réchauffement climatique global aurait des conséquences catastrophiques. Il est dès lors indispensable que les pays responsables démissions de GES 3CLAYTON, « Hot pursuit of polluters »,M. Chr Sc. Monitor, 19 août 2004. 4Massachusetts v EPA& al. 05-1120, 549 U.S du 02/04/07 . http://www.supremecourtus.gov/opinions/. 5effet de serre. A partir dici GES.Gaz à