Rapport d'information déposé (...) par la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire en conclusion des travaux de la Mission d'évaluation et de contrôle (MEC) sur les recettes exceptionnelles de la Défense en 2009 et 2010
Lors de la préparation du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, en 2008, il a été décidé d'adosser la construction du système de défense à un référentiel de programmation. La trajectoire de besoins élaborée pour la période 2009-2020 conduisait à une cible évaluée à 377 milliards d'euros. Celle-ci excédait d'environ 3,5 milliards d'euros le montant des sources de financement anticipées par le ministère du Budget, compte tenu d'une « bosse » de besoins se concentrant sur les années 2009-2011. Au départ, il était convenu que les ressources budgétaires seraient stabilisées en valeur - en euros 2008 - jusqu'en 2011, avant de connaître ensuite une augmentation de l'ordre de 1 % par an. C'est pour couvrir cette bosse qu'il a été décidé de mobiliser des recettes exceptionnelles d'un montant équivalent, recettes principalement issues du produit de la cession des actifs immobiliers libérés dans le cadre des restructurations et de la réduction des formats programmées dans le Livre blanc. Le produit des cessions ne s'avérant pas suffisant, deux autres opérations ont été envisagées : d'une part, à l'occasion du passage à la télévision numérique et de la réorganisation internationale de l'attribution des fréquences hertziennes, il a été décidé de céder les fréquences Félin et Rubis de l'armée de terre et de la gendarmerie, et demandé à la défense de migrer vers d'autres parties du spectre hertzien ; d'autre part, la cession de l'usufruit des satellites de télécommunications en contrepartie de la location de services qui permettrait de limiter la dépense annuelle et de rationaliser leur utilisation. Le rapport examine les raisons du retard ou de l'abandon des opérations qui devaient aboutir à des recettes exceptionnelles. Il examine ensuite dans quelle mesure le budget de la mission Défense a été affecté par ces moins-values et tente de tirer les enseignements des exercices budgétaires 2009 et 2010 dans l'élaboration du budget triennal 2011-2013.
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Extrait
° ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958TREIZIÈME LÉGISLATURE Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 10 juin 2010R A P P O R T D I N F O R M A T I O N DÉPOSÉ en application de larticle 145 du Règlement PAR LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIREen conclusion des travauxde la Mission dévaluation et de contrôle (MEC)(1)sur les recettes exceptionnelles de la Défense en 2009 et 2010
ET PRÉSENTÉ
PARM. Louis GISCARD DESTAING et Mme Françoise OLIVIER-COUPEAU Députés ___
MM. OLIVIERCARRÉ et DAVIDHABIB Présidents. ___
(1) La composition de cette mission figure au verso de la présente page.
La mission dévaluation et de contrôle est composée de : MM. Olivier Carré, David Habib, Présidents ; M. Jérôme Cahuzac, Président de la commission des Finances de léconomie générale et du contrôle budgétaire, M. Gilles Carrez, Rapporteur général ; MM. Pierre Bourguignon, Jean-Pierre Brard, Alain Claeys, Charles de Courson, Richard Dell'Agnola, Yves Deniaud, Jean-Louis Dumont, Jean-Michel Fourgous, Laurent Hénart, Jean Launay, François de Rugy, Philippe Vigier.
I. LES CESSIONS DE BIENS IMMOBILIERS............................................................................. 11
A. DES RÉGLES AMÉNAGÉES ET DE MULTIPLES ACTEURS................................................ 11 1. « Droit de retour » : une dérogation pour le ministère de la Défense......................... 11 2. Lintervention de plusieurs acteurs......................................................................... 11
3. Lapplication des méthodes de cession de droit commun......................................... 13
B. DE LÉVALUATION AU MONTANT RÉELLEMENT PERÇU.................................................. 13 1. Des estimations de départ surévaluées ?................................................................ 13 2. La lourdeur des procédures de dépollution............................................................. 14 3. Les cessions à leuro symbolique aux collectivités................................................... 15
4. Un cas décole : une cession au profit de lÉducation nationale :.............................. 17 5. Une ferme photovoltaïque à la place dune caserne ?.............................................. 18
C. DES RECETTES EXCEPTIONNELLES QUI CONCERNENT ESSENTIELLEMENT PARIS......... 18
1. Le déménagement du ministère de la Défense à Balard.......................................... 18
3. Les biens cédés hors de lopération Vauban........................................................... 20 D. LÉCHEC DE LOPÉRATION VAUBAN............................................................................. 20 1. Un projet de vente de gré à gré à un consortium..................................................... 20
2. La chronologie de léchec...................................................................................... 21 3. France Domaine défend son évaluation.................................................................. 22 4. La suite qui sera donnée aux projets de cessions.................................................... 22
E LE CAS PARTICULIER DE LHÔTEL DE LA MARINE.......................................................... 23
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II. LES ALIÉNATIONS D ONDES HERTZIENNES...................................................................... 24 A. UNE REDISTRIBUTION LIÉE AU PASSAGE À LA TÉLÉVISION NUMÉRIQUE........................ 24 1. Le numérique nécessite moins de fréquences que lanalogique............................... 24 2. Une organisation nationale et internationale très hiérarchisée.................................. 25 3. Une opportunité historique de valoriser une ressource publique rare........................ 26 4 Un processus imposé au ministère de la Défense................................................... 26 . B. LES CARACTÉRISTIQUES DES FRÉQUENCES CONDITIONNENT LE CALENDRIER............. 27 1. Deux bandes aux caractéristiques différentes......................................................... 27 2. Une valeur difficile à apprécier............................................................................... 28 3. Un calendrier retardé et fractionné......................................................................... 29 C. TOUT CHANGEMENT DE FRÉQUENCE COMPORTE UN COÛT......................................... 29
1. Le changement de fréquence aura un coût élevé.................................................... 29
2. Des conséquences opérationnelles non négligeables.............................................. 30
3. Qui supporteratnemelleréle coût du dégagement ?................................................ 30 4. Larmée de terre assure ses arrières...................................................................... 31 III. LA CESSION DE LUSUFRUIT DE SATELLITES DE TÉLÉCOMMUNICATIONS MILITAIRES....... 32
A. TRENTE ANS DE SATELLITES DE TÉLÉCOMMUNICATIONS............................................. 32 1. Les satellites de télécommunications militaires français........................................... 32 2. Une organisation complexe du ministère de la Défense à rationaliser....................... 33 B. LE MÉCANISME DE LA CESSION DUSUFRUIT................................................................ 35 1. Une quasi externalisation....................................................................................... 35 2. Le principe dune vente des satellites a été écarté................................................... 35
3. Suppressions demplois et pertes de compétences................................................. 36 4. Le montant inscrit en loi de finances et le montant réellement attendu...................... 36 C. LES CANDIDATS : DEUX CHAMPIONS NATIONAUX......................................................... 37
1. Thales présente lavantage davoir construit les satellites......................................... 37
2. EADS a accumulé une solide expérience au Royaume-Uni...................................... 38
3. Des risques limités en matière de confidentialité..................................................... 38 4. Faut-il associer Sicral aux deux satellites Syracuse ?.............................................. 39 D. LES LIMITES DE LEXERCICE....................................................................................... 40
1. La garantie de disposer des capacités suffisantes................................................... 40
2. Les capacités mises sur le marché sont faibles....................................................... 40 3. Le lancement de lappel doffres demande plus de temps que prévu......................... 41 4. Tout retard réduit lintérêt de laliénation................................................................. 42
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IV. LES ENSEIGNEMENTS À TIRER DE LEXPÉRIENCE DE 2009 ET 2010................................... 43
A. DES RECETTES EXCEPTIONNELLES TRÈS DÉCEVANTES EN 2009.................................. 43 1. Le retard pris par limmobilier................................................................................. 43 2. Aucune cession de fréquences.............................................................................. 44 3. Les palliatifs mis en uvre.................................................................................... 44 B. DE NOUVEAUX ESPOIRS DÉÇUS EN 2010..................................................................... 46 1. La désillusion immobilière...................................................................................... 46 2. Les retards en matière de fréquences et de satellites.............................................. 46
3. De nouveaux palliatifs pour boucler lannée ?......................................................... 47
C. LES CONSÉQUENCES POUR LE BUDGET TRIENNAL 2011-2013....................................... 48 1. Des recettes exceptionnelles possibles en matière de fréquences............................ 48 2. Des recettes douteuses en matière de satellites...................................................... 48 3. Les principales recettes immobilières se feront attendre jusquen 2014..................... 49 4 La loi de programmation militaire et le contexte économique.................................... 49 .
LISTE DES PROPOSITIONS DE LA MEC............................................................................ 51
EXAMEN EN COMMISSION................................................................................................ 53
I. LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES............................................................................ 59 II. COMPTES RENDUS DES AUDITIONS................................................................................. 61 Table des auditions.......................................................................................................61
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INTRODUCTION
Lors de la préparation du Livre blanc de la défense et de la sécurité nationale, en 2008, il a été décidé dadosser la construction du système de défense à un référentiel de programmation. La trajectoire de besoins élaborée pour la période 2009-2020 conduisait à une cible évaluée à 377 milliards deuros. Celle-ci excédait denviron 3,5 milliards deuros le montant des sources de financement anticipées par le ministère du Budget, compte tenu dune « bosse » de besoins se concentrant sur les années 2009-2011. Au départ, il était convenu que les ressources budgétaires seraient stabilisées en valeur en euros 2008 jusquen 2011, avant de connaître ensuite une augmentation de lordre de 1 % par an.
Cest pour « couvrir » cette bosse quil a été décidé de mobiliser des recettes exceptionnelles dun montant équivalent, recettes principalement issues du produit de la cession des actifs immobiliers libérés dans le cadre des restructurations et de la réduction des formats programmées dans le Livre blanc. Pour autant, il était prévisible que le produit des cessions ne suffirait pas.
Cest la raison pour laquelle deux autres opérations ont été envisagées :
dune part, à loccasion du passage à la télévision numérique et de la réorganisation internationale de lattribution des fréquences hertziennes, il a été décidé de céder les fréquences Félin et Rubis de larmée de terre et de la gendarmerie convoitées par les opérateurs civils parce quelles seraient plus rentables que celles quils utilisaient et demandé à la défense de migrer vers dautres parties du spectre hertzien ;
dautre part, à linstar de ce que font nos voisins doutre-Manche, la cession de lusufruit des satellites de télécommunications en contrepartie de la location de services qui permettrait de limiter la dépense annuelle et de rationaliser leur utilisation.
Au total, le montant des ressources estimées devait excéder légèrement le niveau de la « bosse » de 3,5 milliards deuros. Malheureusement, les recettes exceptionnelles nont été au rendez-vous, ni en volume, ni dans le temps.
Le ministère de la Défense attendait, en 2009, 1 637 millions deuros, dont 972 millions de cessions immobilières et 600 millions de cessions de fréquences. Or, sur ce montant, seuls 626 millions deuros ont été effectivement enregistrés, toutes les sommes ne correspondant pas exactement à des recettes exceptionnelles, ainsi que nous le constaterons dans le rapport.
Pour 2010, 1 702 millions deuros de recettes exceptionnelles ont été inscrits en loi de finances initiale, dont 705 millions deuros de cessions immobilières, toujours 600 millions deuros de cessions de fréquences et
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400 millions deuros relatifs aux satellites de télécommunication. Or, selon les informations dont dispose le Parlement, il apparaît dès à présent que la majeure partie de ces recettes, une fois de plus, ne sera pas au rendez-vous.
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Lintervention de la Mission dévaluation et de contrôle a donc été principalement motivée par lexigence de contrôle démocratique de la sincérité budgétaire. Une mauvaise estimation des recettes dun ministère aussi sensible que celui la Défense ne peut être appelée à se reproduire, dautant que le rapport spécial de la commission des Finances sur le projet de budget pour 2010 attirait lattention, dès novembre 2009,sur le fait que les budgets pour 2009 et 2010 reposaient en grande partie sur des recettes exceptionnelles très hypothétiques.
Pour mener à bien son évaluation, la mission a procédé à une série dauditions dont la liste est jointe en annexe. Selon une habitude désormais solidement établie, la mission a, en outre, bénéficié, dans un esprit de coopération exemplaire, de lexpertise des magistrats de la deuxième chambre de la Cour des comptes.
Au terme de quatre mois de travaux, la mission dévaluation et de contrôle, conformément à sa vocation, expose les raisons qui ont conduit la plupart de ces recettes exceptionnelles à ne pas être aux rendez-vous budgétaires. Ce diagnostic est assorti de propositions destinées à éviter le renouvellement de pareils errements.
Les recettes exceptionnelles de la Défense prévues en 2009 et 2010 reposent essentiellement sur des aliénations immobilières qui ne se sont pas réalisées, mais aussi sur des cessions dondes hertziennes, reportées, ainsi que sur la cession de lusufruit de satellites de télécommunications, dont la mise en uvre savère plus difficile quannoncé.
Cessions immobilières Cessions dondes hertziennes Cessions dusufruit de satellites Divers TOTAL
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Le rapport de la Mission dévaluation et de contrôle examinera dans trois parties successives les raisons du retard ou de labandon des opérations qui devaient aboutir à des recettes exceptionnelles. Dans une quatrième partie, il examinera dans quelle mesure le budget de la mission Défense a été affecté par ces moins-values et tentera de tirer les enseignements des exercices budgétaires 2009 et 2010 dans lélaboration du budget triennal 2011-2013.
de la Défense et du Budget à se renvoyer les responsabilités.
(1) Un tableau plus détaillé figure page 45 du présent rapport.