Les mutations contemporaines des modes de production agricoles ont des conséquences sur le cycle naturel de l'eau et sur les équilibres de la ressource. L'occupation de l'espace rural et les procédés d'exploitation des terres influencent la quantité et la qualité de l'eau disponible sur un bassin versant. Les relations entre l'eau et l'agriculture constituent donc un enjeu majeur de société. L'avis du CESE traite de cette problématique dans le strict cadre de l'activité agricole, essentiellement à l'échelle de la France métropolitaine, en intégrant les défis auxquels l'agriculture doit répondre dans un contexte mondialisé, fortement concurrentiel et perturbé : une meilleure autonomie alimentaire à l'échelle nationale et européenne, l'alimentation en eau potable, la préservation de la qualité de l'eau et des milieux naturels, l'adaptation au changement climatique Il aborde quelques unes des questions qui font aujourd'hui débat sur les territoires tels que l'érosion hydrique des sols ou le rôle des infrastructures agro-écologiques.
Paternité, pas d'utilisation commerciale, partage des conditions initiales à l'identique
Langue
Français
Poids de l'ouvrage
1 Mo
Extrait
LESAVISDU CONSEIL ÉCONOMIQUE, SOCIAL ET ENVIRONNEMENTAL
La gestion et l’usage de l’eau en agriculture
Florence Denier-Pasquier
avril 2013
Les éditions des JOURNAUX OFFICIELS
2013-11 NOR : CESL1100011X Mercredi 30 avril 2013
La gestion et L'usage de L'eau en agricuLture
Avis du Conseil conomique, social et environnemental
prsent par Mme Florence Denier-Pasquier, rapporteure
au nom de la section de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation
Question dont le Conseil conomique, social et environnemental a t saisi par dcision de son bureau en date du 10 juillet 2012 en application de l’article 3 de l’ordonnance no 58-1360 du 29 dcembre 1958 modifie portant loi organique relative au Conseil conomique, social et environnemental. Le bureau a confi à section de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation la prparation d’un avis surLa gestion et l'usage de l'eau en agriculture. La section de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation, prside par M. Joseph Giroud, a dsign Mme Florence Denier-Pasquier comme rapporteure.
Sommaire
■Synthèse de l’avis _________________________4
■Avis8 ______________________________________ Constats et enjeux8 Principaux constats8 Principaux enjeux12 Les préconisations12 Faire de la politique de protection des captages d’eau potable un levier pour accélérer la reconquête globale de la qualité des eaux13
Mettre en place une gestion intégrée de la parcelle au bassin versant et rechercher l’efficience économique et écologique des exploitations ÊPermettre à chaque exploitation de dterminer une stratgie agro-cologique. Êidentifier les sources de pollution principales et les rduire en renforçant le lien entre système de production et services cologiques ÊRepenser l’hydraulique agricole pour l’intgrer dans la gestion hydrologique des bassins ÊRaliser des « remembrements cologiques » fonds sur la gestion quilibre de l’eau ÊCrer une dynamique pour valoriser durablement au sein des territoires les apports de l’agrocologie Réduire les vulnérabilités de l’agriculture aux aléas météorologiques et favoriser les adaptations au changement climatique ÊChoisir des productions et des systèmes adapts aux conditions pdoclimatiques pour prvenir les consquences des scheresses et inondations ÊAnticiper les effets du changement climatique en favorisant la rsilience des productions agricoles
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Privilégier l’irrigation efficiente et partager équitablement la ressource Êinscrire l’irrigation dans les quilibres territoriaux du grand cycle de l’eau ÊOptimiser et mieux rpartir l’eau d’irrigation disponible ÊModerniser et mettre en place des systèmes de gestion collective adapts à la diversit des territoires Améliorer les connaissances et rendre plus cohérente la gouvernance Êintensifier les actions de recherche transversales et les stratgies d’accompagnement du changement ÊFaire de l’chelle hydrographique l’unit d’action locale ÊApprofondir l’action des agences de l’eau et les financements publics ÊAssurer un pilotage national et rendre plus efficace la police de l’eau ÊArticuler la politique de l’eau avec les politiques communautaires
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■Déclaration des groupes __________________44 ■Scrutin63 __________________________________
Annexes65 ____________________________________
Annexe 1 : liste des personnes auditionnées Annexe 2 : liste des personnes rencontrées Annexe 3 : bibliographie Annexe 4 : table des sigles Annexe 5 : glossaire
Annexe 6 : composition de la section de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation
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LA GEStiON E t L'uSAGE DE L'EAu EN AGRiCuLtuRE – 3
La gestion et L'usage de L'eau en agricuLture
synthèse de l’avis1
La terre ne se cultive pas sans eau, l’eau ne se gère pas sans la terre. Conditionne par son grand cycle naturel (prcipitations, vaporation, ruissellement, infiltration…), les liens entre l’eau, les sols et donc l’agriculture, sont indissociables. Depuis des siècles, les agriculteurs amnagent l’espace pour grer l’eau et amliorer leurs conditions de production. Même si une multiplicit d’autres facteurs entre en compte, les mutations contemporaines des modes de production agricoles ont des consquences sur le cycle naturel de l’eau et sur les quilibres de la ressource. L’occupation de l’espace rural et les procds d’exploitation des terres influencent la quantit et la qualit de l’eau disponible sur un bassin versant. Les relations entre l’eau et l’agriculture constituent donc un enjeu majeur de socit. L’avis du CESE traite de cette problmatique dans le strict cadre de l’activit agricole, essentiellement à l’chelle de la France mtropolitaine, en intgrant les dfis auxquels l’agriculture doit rpondre dans un contexte mondialis, fortement concurrentiel et perturb : une meilleure autonomie alimentaire à l’chelle nationale et europenne, l’alimentation en eau potable, la prservation de la qualit de l’eau et des milieux naturels, l’adaptation au changement climatique… i l aborde rsolument quelques unes des questions qui font aujourd’hui dbat sur les territoires à l’instar de l’rosion hydrique des sols ou du rôle des infrastructures agro-cologiques. Parmi ces sujets controverss, deux d’entre eux ont fait l’objet de divergences au sein de notre assemble : le financement de certains leviers de rduction des pollutions diffuses (redevances…) et la cration de nouveaux stockages d’eau pour l’irrigation. Pour le CESE, la question n’est pas d’tablir de quelconques responsabilits quant aux problèmes constats, mais de rechercher des solutions efficaces pour relever les dfis actuels et à venir. Au même titre que tous les autres usages de l’eau, l’agriculture a vocation à respecter l’quilibre des cosystèmes pour pouvoir s’inscrire dans la dure et demeurer ainsi productive à long terme. Si cet avis ne prtend pas faire le tour des très nombreuses expriences et innovations positives mises en œuvre par des agriculteurs, il y puise nanmoins son inspiration pour proposer des pistes à moyen et long termes. Les prconisations formules tmoignent de la conviction qu’il n’y a pas d’opposition fondamentale entre le dveloppement indispensable de l’agriculture, le maintien de la qualit de l’eau et la prservation des milieux aquatiques. En ce sens, l’avis identifie des chemins de convergence, reposant notamment sur des amliorations dans les pratiques agricoles et le dveloppement de productions d’intrêt agro-cologique, dans le respect de la durabilit conomique des exploitations. toutefois, au regard des progrès significatifs qu’il reste à accomplir, le CESE appelle à des changements structurels. Les chemins à emprunter sont bien videmment diffrents selon les territoires et leurs enjeux : dvelopper une action prioritaire sur les plus sensibles peut permettre de construire graduellement des solutions utiles à tous.
1 voix contre 21 et 45 abstentionsL’ensemble du projet d’avis a été adopté au scrutin public par 104(voir le rsultat du scrutin en annexe).
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Cette transition ne peut se faire sans mesures adaptes pour accompagner techniquement et conomiquement non seulement les agriculteurs mais aussi les autres acteurs socio-conomiques. La reconquête progressive, et donc collective, des quilibres environnementaux est un vecteur d’innovations sociales et techniques, permettant une gestion scurise sur le long terme des biens communs vitaux que sont l’eau et l’alimentation. Seule une dmarche cohrente et concerte, engage progressivement des parcelles agricoles aux grands bassins versants, peut donc permettre de nourrir les dynamiques djà en œuvre, afin de rpondre efficacement aux dfis communs de l’eau et de l’agriculture.
Les principales préconisations
ÊFaire de la politique de protection des captages d’eau potable un levier pour accélérer la reconquête globale de la qualité des eaux y Conforter la politique publique de protection des captages et en faire un enjeu d’amnagement et de dveloppement du territoire y Agir sur les zones les plus sensibles des aires d’alimentation des captages par : une contractualisation avec les agriculteurs et forestiers concerns, dans de
nouvelles MAEt de longue dure une priorit affirme aux systèmes gnrant le moins de pollutions diffuses : agriculture biologique, forêt, agroforesterie... une sortie rapide, sur ces parcelles, de l’utilisation des produits phytosanitaires de synthèse une compensation financière en contrepartie d’exigences durables plus fortes et d’obligations de rsultats quantifis
ÊMettre en place une gestion intégrée de la parcelle au bassin versant et rechercher l’efficience économique et écologique des exploitations y à chaque exploitation de dterminer une stratgie agrocologique Permettre dvelopper les procds agronomiques permettant de rduire l’emploi des intrants de synthèse de manière conomiquement viable renforcer leur appropriation et la formation en compltant les financements existants par une redevance progressive sur les engrais azots minraux et par l’augmentation de la redevance sur les produits phytosanitaires yde pollution principales en renforçant le lien entre systèmes de Rduire les sources production et services cologiques soutenir les exploitations agro-cologiques à bas niveaux d’intrants, pour favoriser des transferts d’expriences entre rgions ou filières encourager la production de rfrences agronomiques, conomiques et
cologiques veiller à la cohrence territoriale des rglementations sectorielles et leur appropriation à l’chelle des exploitations
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y Repenser l’hydraulique agricole pour l’intgrer dans la gestion hydrologique des bassins y Raliser des « remembrements cologiques » en dfinissant au pralable leur cadre juridique et financier au sein d’une large concertation y une dynamique pour valoriser durablement les apports de l’agrocologie dans Crer les territoires
ÊRéduire les vulnérabilités de l’agriculture aux aléas météorologiques et favoriser les adaptations au changement climatique y Choisir des productions et des systèmes adapts aux conditions pdoclimatiques pour prvenir les consquences des scheresses et inondations y des rsilience Anticiper les effets du changement climatique en favorisant la productions agricoles
ÊPrivilégier l’irrigation efficiente et partager équitablement la ressource •inscrire l’irrigation dans les quilibres territoriaux du grand cycle de l’eau gnraliserpar les SAGE la dfinition des priorits d’usages et la rpartition des volumes prlevables entre catgories d’utilisateurs (domestique, agricole et industriel) inscrire les transferts de ressource dans une approche globale d’amnagement du territoire y Optimiser et mieux rpartir l’eau d’irrigation disponible organiser la rpartition du volume prlevable agricole, en commençant par les ZRE, en fonction d’une adaptation prventive des besoins d’irrigation intgrer au sein d’une politique nationale et au regard d’un bilan coût/efficacit, la cration des « retenues de substitution », pour une gestion de bassin cohrente rserver les financements publics à des programmes territoriaux destins en priorit à des pratiques agro-cologiques, des productions alimentaires et des activits à fort taux d’emplois ydes systèmes de gestion collective adapts à la Moderniser et mettre en place diversit des territoires mainteniren zone agricole protge les territoires desservis par un rseau collectif d’irrigation s’inscrire dans une dynamique d’conomie de l’eau prleve, fonde sur la modernisation des rseaux, le dveloppement de systèmes de tarification innovants et la rgulation des acteurs locaux (OuGC, structures publiques …)
ÊAméliorer les connaissances et rendre plus cohérente la gouvernance y intensifier les actions de recherche transversales et les stratgies d’accompagnement du changement y de l’chelle hydrographique l’unit d’action locale Faire
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y inscrire l’action des agences de l’eau dans des dmarches rsolument prventives et incitatives pour des pratiques agricoles et des amnagements de bassin adapts y Poursuivre le rquilibrage des niveaux de contribution des diffrents types d’usagers et rechercher une meilleure quit dans l’attribution des financements publics ynational et rendre plus efficace la police de l’eau Assurer un pilotage appliquer la mthode Ecophyto à la rduction des pollutions issues des excès de matières fertilisantes raffirmer l’importance des missions de police de l’eau harmoniser les règles concernant la gestion et l’usage de l’eau en maintenant les objectifs de protection de la ressource y Articuler la politique de l’eau avec les politiques communautaires, dont la PAC.
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avis
L’eau est un bien commun non substituable, essentiel à la vie de l’Homme et de l’ensemble des espèces animales et vgtales. A l’chelle mondiale, le volume reste constant, mais il est ingalement rparti et en perptuel mouvement dans le cycle naturel de l’eau (prcipitations, vaporation et vapotranspiration, ruissellement, infiltration...). La presque totalit de cette eau (97%) est sale, l’eau douce, dans les glaciers, les nappes ou les eaux de surface ou atmosphriques sous forme liquide, de glace ou de vapeur, ne reprsentant que 3%2. Parmi cette dernière, seule une infime partie s’avère directement consommable dans les conditions techniques et conomiques actuelles, ce qui reprsente moins de 0,03% de l’eau de la planète. Sa qualit, elle, peut s’altrer durablement sous l’impact des activits humaines que l’Homme doit veiller à prvenir et si ncessaire rparer. Pour l’agriculture, l’eau constitue une ressource indispensable, sans laquelle aucune production n’est possible. i l importe par consquent de la grer et de l’utiliser de manière optimale afin de permettre à cette activit de satisfaire sa mission première : nourrir sainement la population en garantissant les autres usages de l’eau et les impratifs sanitaires, tout en respectant les quilibres naturels. La relation eau/agriculture revêt aujourd’hui une acuit majeure. Dans un contexte marqu à la fois par une pression dmographique croissante conjugue à l’urbanisation consommatrice de terres agricoles et à une forte volution des pratiques alimentaires dans certaines parties du globe, il est impratif d’intgrer pleinement les exigences environnementales et le changement climatique. C’est en prenant en compte ces diffrentes dimensions au niveau de la France que le CESE a dcid d’aborder cette question essentielle qui concerne l’ensemble de notre socit, en s’intressant exclusivement àgestion et l’usage de l’eau en agricultureLa . Cet avis vient ainsi complter ceux rendus par notre assemble en 2008 et 2009 respectivement surLes activités économiques dans le monde, liées à l’eauetLes usages domestiques de l’eau.
constats et enjeux
Principaux constats
L’ensemble des auditions ralises - ainsi que le dplacement effectu sur le bassin versant du Marais poitevin3- par la section de l’agriculture, de la pêche et de l’alimentation du CESE ont permis de mettre en vidence diffrents lments de constats, caractrisant la situation de la France en matière d’eau et de son utilisation par l’agriculture. Le choix a t fait d’en dresser ci-après un relev synthtique et de prsenter plus loin, en tant que de besoin, des dveloppements plus complets à l’appui des prconisations formules par notre assemble :
2 Eaufrance. Source 3 effectu les 19 et 20 fvrier 2013 . Dplacement
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