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LES EQUIPES MULTICULTURELLES
Par culture, on entend le mode de vie développé par un groupe d’êtres humains
transmis aux générations suivantes, consciemment ou non. Cette culture est constituée par des
formes de comportement déterminé par l’histoire d’un peuple. Plus précisément des idées, des
habitudes, coutumes ou traditions sont acceptées et développées collectivement et
symbolisent un sentiment d’appartenance.
Qui dit mondialisation dit interculturel ! Dans cet exposé nous nous attacherons à la
constitution de ces équipes dans le cadre de l'expatriation.
L'équipe multiculturelle se définit comme groupe d'individus de cultures diverses
travaillant sur des questions thèmes qui englobent plusieurs pays.
I - Comment appréhender la dimension interculturelle dans une démarche
d'expatriation ?
Les entreprises commencent à investir dans la dimension interculturelle pour
renforcer l'efficacité des expatriés et leur faire gagner du temps d'adaptation. Ainsi il est
nécessaire de comprendre les différences et spécificités culturelles : ainsi "on n'arrive pas en
retard en rendez-vous avec un Allemand, mieux vaut éviter de couper la parole à celui qui
s'exprime au cours d'une réunion avec des Anglais et lorsqu'un Japonais dit oui, cela ne veut
pas forcément dire je suis d'accord ". On considére que tout individu est également le reflet
de sa propre culture nationale et qu’elle est donc susceptible de l’influencer dans son
comportement, sa prise de décision etc…Finalement les organisations ont tendance à se
tourner vers un management interculturel basé sur l’acceptation, la compréhension des
différences et leur interaction, au sein de groupes de projet multiculturels. Dans une situation
interculturelle, les relations de travail sont fondées sur la reconnaissance, la synergie et
1l’enrichissement mutuel de par les différences culturelles .
1 Entreprise & Carrières l'hebdo n° 377 du 4 mars 1997
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D'ailleurs Nicolas Filc, consultant au sein du cabinet conseil en Management
2Stratégique ISOCEL , détermine des " Repères Culturels de Sensibilité " pour appréhender
l'interculturalité. Ceux-ci permettent à l'individu de déterminer les facteurs de différences, de
les comprendre et par conséquent de mettre en place une communication plus effective. On
peut en distinguer quatre principaux :
! La Langue / Langage : IL s'agit d'identifier l'importance du verbal par rapport au non
verbal, la place du non-dit dans la communication, déterminer le degré de formalisme à
adopter dans la négociation ou le travail en groupe.
!L'économie : Connaître les motivations qui animent chaque individu par rapport
schéma économique et de reconnaissance social de son pays. Ainsi Maslow détermine une
hiérarchie des besoins : la reconnaissance
!Religion /Idéologie : La religion revêt une grande importance dans les us et
coutumes des individus, elle détermine bien souvent le rapport à l'argent, la notion de morale
commerciale
! Politique/Organisation sociale
Ces différentes caractéristiques facilitent la mise en forme d'un management interculturel
efficient où les dysfonctionnements et différences sont identifiés afin d'éviter les écueils.
II – Les repères culturels de management :
Un des premiers à analyser les interactions entre les déterminants culturels et les
attitudes au travail fut le chercheur néerlandais Geert Hofstede. En effet il a mené une étude
au sein de la multinationale américaine IBM implantée dans 64 pays. Il a choisi de recueillir
les attitudes et valeurs des employés au moyen de questionnaires –1000 au total -.
2 conférence NGP du 6 mai 1999 "interculturalité et Ressources Humaines" 6 mai 1999
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Il a ainsi pu dégager de cette étude 4 variables qui permettent de comparer les
spécificités nationales.
Et à partir de ces quatre variables, Hofstede débouche sur le positionnement de
plusieurs pays selon leurs spécificités culturelles et managériales.
" L’individualisme par rapport au collectivisme :
Dans le premier cas, l’individu est surtout préoccupé de faire valoir ses propres intérêts. Son
intégration dans le groupe est souvent difficile et conditionnée par ses propres objectifs.
Dans une société « collectiviste », les intérêts du groupe priment très fortement sur ceux de
l’individu. L’individu existe principalement par son appartenance à différents groupes :
famille, village, tribu voire entreprise. D’après Hofstede, les pays occidentaux sont considérés
comme les plus individualistes a contrario pour les pays d’Afrique, du Proche-Orient et
3d’Asie .
"La masculinité par rapport à la féminité :
Hofstede établit une comparaison entre les sociétés qui privilégient les valeurs dîtes
masculines telles que la domination, les performances, l’argent au détriment des valeurs
comme la qualité de vie, l’aide à autrui et la famille…. Dans les sociétés plus féminines, les
valeurs dominantes pour les hommes comme pour les femmes, sont celles plus
traditionnellement associées au rôle de la femme : modestie, mise en évidence des relations
personnelles plus que de l’argent, soucie de la qualité de vie.
Les pays nordiques et les Pays-Bas révèlent une orientation fortement féminine. Dans certains
pays latins, comme la France, l’Espagne et le Portugal, une telle tendance peut exister mais de
façon beaucoup moins marquée.
" La distance hiérarchique :
D’après Hofstede, il indique "la perception du degré d’inégalité de pouvoir entre celui qui
détient le pouvoir hiérarchique et celui qui y est soumis ". Ainsi chaque culture aborde de
façon différente le fait que " les individus sont inégaux : inégaux en force physique et en
capacités intellectuelles".
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Certaines sociétés ont tendance à atténuer ces différences tandis que d’autres les maintiennent
et développent un certain élitisme. Au-delà de cet aspect général, la distance hiérarchique
constitue un élément important des relations de travail. Elle se manifeste à la fois dans la
façon dont les dirigeants exercent leur pouvoir et dans l’étendue de ces pouvoirs et comment
les autres le subissent. La distance hiérarchique est forte dans certains pays développés
comme la France, l’Espagne, la Belgique et le Japon. Les pays anglo-saxons, germaniques et
scandinaves présentent une distance hiérarchique faible cf. développement du système de
participation.
" L'aversion du risque :
Cette dimension envisage l'attitude par rapport à l'avenir, le degré de tolérance par rapport à
l'imprévisible. Hofstede distingue ainsi les sociétés à fort et à faible contrôle de l'incertitude.
Dans l'entreprise, le contrôle de l'incertitude se manifeste plus spécifiquement à travers le
degré de standardisation, de spécialisation, de formalisation et de planification.
Les pays latins d'Europe et d'Amérique, les pays méditerranéens, le Japon et la Corée
témoignent d'un fort contrôle de l'incertitude. Les idéologies, les religions, la science peuvent
également aider à dépasser l'incertitude en apportant des vérités absolues, des certitudes
fermes et stables, et souvent la promesse d'un monde meilleur. Ceci se reflète la capacité à
anticiper et gérer à court, moyen et long terme de chaque société.
Les équipes multiculturelles constituent une force stratégique certaine. Elles
permettent de conjuguer et développer des synergies dans une optique de progrès. Le"
multiculturel " génère beaucoup de créativité, de solutions originales en terme de stratégies et
de compétences. Ainsi l'innovation et l'anticipation des évolutions sont au cœur des
réalisations des équipes multiculturelles. Dans une optique marketing, de par la mise en
contact de spécificités culturelles, les équipes multiculturelles développent une facilité
certaine pour s'adapter aux évolutions des marchés locaux ainsi qu'aux différences politiques
et légales.
3 HOFSTEDE Geert " Cultures and Organizations " edited by Bob Garatt 1991
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Il est important de souligner que les différences de culture nationale peuvent être
source de conflits et d'inerties voire de manque de "productivité" dans le travail. Elles peuvent
en outre entraîner de graves divergences de vues sur les méthodes à suivre et les objectifs à
atteindre.
Il existe dons des cabinets de consultants spécialisés dans l'accompagnement des équipes
multinationales. Leur méthode repose principalement sur la prise de conscience des
stéréotypes respectifs des "participants" afin de mieux s'en débarrasser et acquérir une
4meilleure compréhension et ouverture d'esprit.
Par conséquent, un temps d'adaptation est nécessaire à l'équipe multiculturelle afin
5d'optimiser la relation de travail. D'après Cordula BARZANTNY confirme que le TEMPS
est un facteur important pour établir le mode de fonctionnement de l'équipe. Selon elle, les
expatriés en équipes multiculturelles ne sont donc efficaces qu'à partir d'un an. Et ici repose
la question de la légitimité de la durée de l'expatriation et de l'adaptabilité quant à la gestion
de ces équipes. Le TEMPS est une variable qu’Hofstede n’a pas étudiée mais qui revêt toute
son importance depuis l’émergence de l’Asie : le temps et la conscience du temps. Les
Asiatiques ont une conception ‘cyclique’ du temps alors que les occidentaux ont une
conception plutôt ‘linéaire’ du temps. Ain