Le monde numérique propose de formidables fenêtres ouvertes sur la société, le savoir et les univers imaginaires, ainsi que des possibilités de communication extraordinaires ! Pour l'apprivoiser en toute sérénité, ces 4 histoires évoquent les pièges qu'il recèle afin de mieux les éviter. Pauline vient d'avoir son premier téléphone ! Très vite, les influenceuses des chaînes vidéo et des réseaux sociaux la fascinent ; sa vie lui paraît alors de plus en plus triste et banale. Confronté à une vidéo d'agression éclair, Yanis ne trouve plus le sommeil. Ces images l'obsèdent et il s'inquiète pour Théo, la victime. Les membres de la famille de Simon s'accusent mutuellement d'être accros aux écrans. Ils se lancent alors le défi de s'en passer pendant un mois. Mission impossible quand on est un véritable gameur ? Pour entrer dans un groupe de discussion de filles, Lisa a accepté d'envoyer une photo d'elle en petite tenue. Mais quand l'image tombe entre de mauvaises mains, c'est la panique… En complément : un dossier documentaire de 16 pages qui explique les bouleversements du numérique, ses travers et dangers et présente les solutions pour s'en prémunir. Avec l'aimable soutien de l'association e-Enfance. Un monde pas à pas : Une collection qui aborde avec intelligence et sensibilité des sujets essentiels de société et qui s'attache à les rendre clairs et accessibles pour tous. Une invitation à la réflexion et à la compréhension du monde pour les jeunes lecteurs qui construisent eux aussi, pas à pas, la société de demain.
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Extrait
Autrîce et journalîste, socîologue de ormatîon, Cécîle Benoîst s’întéresse aux rela-tîons entre les humaîns et l’envîronnement, aux droîts des enants et des emmes, aux peuples et aux cultures du monde. Après un parcours dans l’édîtîon et la presse jeunesse, elle passe désormaîs presque tout son temps à écrîre !
Dîplômé de l’école de Condé de Parîs, Anatole Aurère est un grand an du pînceau et de l’encre. Il vît actuellement dans le sud de la France, où îl profite du soleîl et se consacre tout partîculîèrement à la lîttérature jeunesse.
suivi d’un dossier documentaire réalisé par l’autrice
OSD’Â N D E À
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Une question de libert
Ma génératîon, celle quî a connu la crîse pétrolîère, le déve-loppement de la télévîsîon, la croîssance du chômage et d’autres réjouîssances comme la musîque dîsco, a vu le monde changer. Rapîdement. Pourtant, nous avons eu une jeunesse heureuse, empreînte de lîbertés. Lîbertés de penser, d’agîr, de croîre, de bouger. L’accès à la connaîssance nécessîtaît l’eort de se nourrîr d’avîs varîés pour se orger une opînîon. Se déplacer étaît împortant pour se rencontrer et nouer des relatîons humaînes. L’attente lors d’échanges de courrîers postaux împosaît de réléchîr au sens de chaque phrase, de chaque mot. Il allaît donc du temps, de l’engagement, des eorts. Lorsque j’évoque ces questîons avec mes enants, îls voîent de prîme abord une époque ennuyeuse, poussîéreuse, au rythme alîgeant. La révolutîon numérîque, matérîalîsée par les smartphones, le règne de l’îmage, Internet et les réseaux socîaux, a permîs bîen évîdemment de nombreuses amélîoratîons : on communîque en temps réel, par quelques lettres quî résument une pensée ou une phrase ; le savoîr semble être à portée de maîn ; les loîsîrs, le plaîsîr du jeu ou du partage, sont accessîbles îmmédîatement, sans eort. Le smartphone est devenu une extensîon presque physîque de la personne, augmentant nombre de ses capacîtés : on peut tout aîre vîte et bîen. Cette révolutîon est ormîdable, et loîn de moî l’îdée de la dénîgrer. Pourtant, quand on y regarde de plus près et de açon scîen-tîîque, sous une apparence redoutablement séduîsante, elle porte des rîsques nouveaux et complexes qu’îl seraît sans doute bon de décortîquer pour les génératîons à venîr. Ce qu’îl aut comprendre avant tout est que la gratuîté des servîces et applîcatîons que ces outîls nous orent est îllusoîre. Cette révolutîon aît avant tout de nous des consommateurs peu conscîents de leur statut. Le temps passé sur les écrans nous
expose à des publîcîtés plus ou moîns claîrement aîchées ; îl est sî împortant que les concepteurs de servîces usent d’ap-proches scîentîîques, basées sur ce que l’on appelle les bîaîs cognîtîs, pour nous conduîre à rester le plus longtemps possîble devant notre écran. Comparaîson socîale, choîx par déaut, efets de récompenses, etc., notre cerveau va être soîgneusement nourrî pour produîre de la dopamîne, et créer une orme de plaî-sîr quî va nous rendre înconscîemment accros. Certaînes études montrent qu’îl est paroîs très dîîcîle pour certaîns de ne pas regarder leur smartphone à chaque notîîcatîon. Pour d’autres, le rélexe est de le consulter sans arrêt, avec l’angoîsse de ne pas en avoîr reçu. Nous devenons donc peu à peu « prîsonnîers » de nos écrans. Nous avons également l’îllusîon de maïtrîser les contenus que nous regardons. Là encore, et toujours parce que nous « scot-cher » à l’écran est la base de leur développement, les réseaux socîaux ont tendance, à travers leurs algorîthmes, à nous mon-trer ce que nous recherchons naturellement. Derrîère les choîx par mot-clé que nous eectuons sur YouTube ou Google, la réponse quî nous est apportée n’est pas celle de notre voîsîn. Elle est adaptée à ce qu’îls savent de nous, en onctîon de nos choîx précédents. Il en est de même pour les posts que nous voyons. C’est ce que l’on appelle la bulle cognîtîve, cet espace dans lequel notre pensée est réduîte à ce que l’on croît être notre opînîon. Sî nous recherchons à savoîr, par exemple, avec un sourîre aux lèvres, sî la Terre est plate, très vîte, on ne nous proposera plus que des sîtes, des blogs, des comptes quî confirment cette opînîon. N’ayant plus accès à une dîversîté de vîsîons, nous passons peu à peu à des certîtudes. Ce phénomène exîste sur tous les sujets, depuîs les vaccîns jusqu’au réchauement clîmatîque, et met en danger les démocratîes. Dans cet unîvers, le doute n’est plus permîs, le débat non plus. Des blocs radîcaux d’opînîons tranchées s’opposent, paroîs vîolemment.
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Pour les plus jeunes, ces phénomènes quî structurent le web et les réseaux socîaux – que Maud qualîîe, dans l’une des hîstoîres, de « boïtes à mîrage » – ont des eets pervers. La constructîon artîîcîelle, vîrtuelle, aseptîsée d’opînîons ou d’îmages de per-sonnes crée un malaîse, le sentîment qu’une vîe « normale » ne l’est plus sî elle ne répond pas aux standards ou modèles proje-tés par l’écran. Et se conormer contre nature à ces modèles peut provoquer de la sourance : harcèlement, addîctîon aux écrans, désocîalîsatîon, conlîts amîlîaux, îsolement.
Alors îl aut sans doute éduquer à ces dévîances de la révo-lutîon numérîque. Pour cîter Jaurès : « Il ne peut y avoîr révolu-tîon que là où îl y a conscîence. » Sans eorts pour comprendre les manîpulatîons dont nous sommes paroîs l’objet, sans recul pour réuter les avîs radîcaux et sans volonté de rechercher les doutes et les nuances, sans vîgîlance sur ce que nous aîsons ou postons et quî nous révèle sans que nous le sachîons, nous par-vîendrons dîîcîlement à vîvre dans une socîété apaîsée, dans laquelle nous aurons des opînîons mûrîes et structurées, et des relatîons socîales saînes. Et c’est sans doute cela, avant tout, le bonheur. Fînalement, cette éducatîon aux écrans est îndîspensable sî nous voulons proîter de ces outîls abuleux, tout en conservant le goût de la lîberté.