La maladie de Gaucher est la plus fréquente des maladies lysosomiales. Elle est aussi la première à avoir pu bénéficier d’un traitement spécifique par enzymothérapie substitutive. Il s’agit d’une maladie de surcharge caractérisée par l’accumulation d’un glycolipide, le glucosylcéramide (ou glucocérébroside), liée à une activité enzymatique déficitaire de la glucocérébrosidase, (ou β-glucosidase acide, EC3.2.1.45), une enzyme lysosomiale codée par le gène GBA1. La transmission de la maladie de Gaucher est autosomique récessive. Dans des cas très exceptionnels, le déficit intéresse la saposine C, co-facteur de la β-glucosidase acide. La surcharge des macrophages en glucosylcéramide est à l’origine des principales manifestations de la maladie, entraînant une hépatomégalie, une splénomégalie responsable d’une anémie et d’une thrombo-pénie, et une atteinte osseuse. L’expression de la maladie est cependant très variable et dépend du degré d’instabilité et d’activité résiduelle de l’enzyme mutée. Dans les formes les plus sévères, il existe une atteinte du système nerveux central. On distingue schématiquement trois phénotypes :– la maladie de Gaucher de type 1, de loin la plus fréquente, se définit par l’absence d’atteinte neurologique primitive ;
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Extrait
1
Médecine interne
Chapitre S03P01C26 Maladie de Gaucher
PIERREKAMINSKY
6 C2 1 P0 3 0 S
6 2 C 1 P0 3 S0
La maladie de Gaucher est la plus fréquente des maladies lysoso miales. Elle est aussi la première à avoir pu bénéficier dun traitement spécifique par enzymothérapie substitutive. Il sagit dune maladie de surcharge caractérisée par laccumulation dun glycolipide, le glucosyl céramide (ou glucocérébroside), liée à une activité enzymatique défici taire de la glucocérébrosidase, (ouβglucosidase acide, EC3.2.1.45), une enzyme lysosomiale codée par le gèneGBA1. La transmission de la maladie de Gaucher est autosomique récessive. Dans des cas très excep tionnels, le déficit intéresse la saposine C, cofacteur de laβglucosidase acide. La surcharge des macrophages en glucosylcéramide est à lorigine des principales manifestations de la maladie, entraînant une hépatomé galie, une splénomégalie responsable dune anémie et dune thrombo pénie, et une atteinte osseuse. Lexpression de la maladie est cependant très variable et dépend du degré dinstabilité et dactivité résiduelle de lenzyme mutée. Dans les formes les plus sévères, il existe une atteinte du système nerveux central. On distingue schématiquement trois phé notypes (Tableau S03P01C26I) : la maladie de Gaucher de type 1, de loin la plus fréquente, se défi nit par labsence datteinte neurologique primitive ; la maladie de Gaucher de type 2 est caractérisée par une atteinte neurologique létale aiguë et affecte le nourrisson ; la maladie de Gaucher de type 3 se caractérise par une forme neu rologique subaiguë et débute chez le jeune enfant ou ladolescent. Si la maladie de Gaucher bénéficie dun traitement efficace sur lorganomégalie et les manifestations hématologiques, latteinte neuro logique reste réfractaire à celuici et les lésions osseuses sont source dun handicap non négligeable.
Épidémiologie
La maladie de Gaucher est une maladie panethnique, même si le type 1 est plus fréquent dans les populations dorigine européenne [1]. Son incidence annuelle globale est denviron 1/40 000 à 1/50 000
Tableau S03P01C26I
Âge de début Hépatomégalie Splénomégalie Cytopénie Atteinte osseuse Atteinte neurologique Survie Prédilection ethnique
S03P01C26
naissances, mais lincidence du type 1 atteindrait 1/850 naissances dans la population ashkénaze. Le type 2 a une prévalence estimée à moins de 1/500 000. Celle de type 3 est estimée à 1/100 000. Il existe un foyer en Suède (maladie de Gaucher de type « norrbottnien ») avec e un effet fondateur vers leXVIsiècle dune mutation homozygote L444P/L444P dans la province de Norrbottnen.
Aspects génétiques
Le gèneGBA1codant laβglucosidase acide est situé sur le chromo some 1 (1q21.32) et comporte 11 exons. Il est flanqué en aval dun pseudogène, qui présente une homologie de près de 95 % avec le gène GBA1. À ce jour, plus de 300 mutations ont été répertoriées, entraî nant soit labsence de synthèse de lenzyme, soit une diminution de lactivité catalytique et/ou de la stabilité de lenzyme produite [4]. Cer taines mutations complexes impliquent des recombinaisons avec le pseudogène (mutation « Rec »). Dans la population ashkénaze, la mutation N370S, à elle seule, a une fréquence de plus de 70 % et les cinq allèles N370S (1226G), 84GG, L444P (1448C) et IVS(2+1), et Rec NciI rendent compte denviron 90 % des mutations observées. Dans les autres populations, ces cinq allèles ne représentent plus que 75 % environ des mutations, la mutation 84GG étant très rare alors que la mutation L444P neuf fois plus fréquente [1]. En France, la fré quence de la mutation N370S est ainsi denviron 40 %. On a pu esti mer que, dans la population générale, la prévalence de la mutation N370S est de 2,3 % chez les ashkénazes, diminuant à environ 0,5 % dans les autres populations européennes [1, 4]. Lenzyme résultant dune mutation N370S est stable, mais a une activité catalytique plus basse. La seule présence de cette mutation sur un allèle suffit à prédire labsence datteinte neurologique et donc une maladie de Gaucher de type 1. Les sujets homozygotes N370S/N370S ont un phénotype peu sévère et sont parfois asymptomatiques. À linverse, la mutation nonsens 84GG entraîne labsence de synthèse deβglucosidase acide. Lhomozygotie 84GG/84GG est considérée comme létale. La mutation L444P entraîne la synthèse dune enzyme instable et dactivité effondrée. Ainsi, dans le type 1, la présence dune mutation « sévère » (84GG, L444P, RecNciI) associée à une muta tion N370S entraînetelle souvent un phénotype sévère. Par ailleurs, une homozygotie L444P/L444P se traduit par une maladie de Gau cher de type 2 ou 3, malgré dexceptionnels cas de types 1 décrits au
Caractéristiques des trois phénotypes de la maladie de Gaucher. Type 3 Type 1 Type 2 3a 3b Enfanceadulte Nourrisson Enfance Enfance + à +++ + +++ +++ + à +++ + +++ +++ + à +++ + +++ +++ + à +++ 0 ++ +++ 0 +++ ++ + 6 à > 80 ans < 2 ans 20 à 40 ans 20 à 40 ans Ashkénazes Panethnique Suède Panethnique